Noir sur noir


 

Ce texte critique (ou cette méditation) sur le noir est pensé comme un journal de bord s’appuyant sur les trois lectures principales qui l’ont accompagné : Pierre Soulages est-il un peintre affirmationniste ? d’Alain Badiou, Noir : Histoire d’une couleur particulière de Michel Pastoureau et Peau noire, masques blancs de Frantz Fanon. Quelques lignes d’introduction et parfois autobiographiques contextualiseront mes textes. Et la seule question essentielle qui sera posée est : comment émanciper la couleur noire ?

 

Lundi 27 janvier 2020. L’outrenoir.

Il y avait du monde à l’exposition Soulages au Musée du Louvre. Les lumières étaient très gênantes et il y avait peu de tableaux. Je ne suis pas resté longtemps (1)

L’œil tente de suivre les changements délicats de l’outrenoir de Pierre Soulages (malgré les horribles éclairages qui jaunissent les toiles), mais au cœur de cette expérience un doute s’impose à moi – c’est cette formule d’ « outrenoir »… Quel est cet « outrenoir », ce noir « traversé » ou « passé » et que trouve-t-on une fois le « noir passé » ou « dépassé » ? Certains, comme le philosophe Alain Badiou, nous disent : « Dans la langue de Soulages comme dans sa peinture, l’apparence du refus, le noir, la négation créent la lumière, l’affirmation mobile. (2) » Le noir, qui serait négation, créerait la lumière, qui serait affirmation (mobile). Comment cela fonctionne concrètement ? Badiou précise : « Par exemple, devant les immenses polyptyques noirs, l’espace créé pour celui qui regarde est tel que les mouvements, la marche, font à chaque instant changer les lumières et les couleurs déclinées par le noir. Ainsi le triangle pictural devient : traversée différenciée du noir par le peintre ; chose exposée comme synthèse infinie des lumières dans le noir ; regard mobile dépliant une partie de cette infinité. (3) » À la lecture de ce passage, je me suis arrêté. Il y aurait donc là trois personnages en jeu : le peintre, la « chose exposée » et le « regard mobile » et tous joueraient ou rejoueraient (ce sont les acteurs nécessaires de cette mise en scène) le phénomène ou le scénario de l’outrenoir. Il y a là, positionnés sur scène : celui qui produit le noir, le « negro » (noir en espagnol), celui qui le regarde et nous commençons à comprendre que ce noir dont nous parlons n’est que le support-gouffre sur lequel viennent se poser, s’apposer et s’imposer la transparence d’un regard, transparence qui est pour le philosophe un calme et une plénitude rassurée : « La peinture de Soulages paraît d’abord massive et tout à fait sûre d’elle-même. Elle n’est pas de l’ordre de la déconstruction angoissée. Elle relève plutôt du calme de la construction. (4) » Nulle angoisse pour le philosophe, non, car le pire a été résolu. Sauvé, le philosophe est sauvé car le gouffre n’est plus gouffre à partir du moment où nous sommes assurés de n’y voir, une fois dé-voilé, que lumière : « Comme nous l’avons vu, son noir est lumière. (5) » Le noir ne se cache plus derrière son voile tel un cafard gesticulant une fois sorti de son lit, il se donne au regard et au désir du philosophe. Alain Badiou excommunie l’étranger. « Outrenoir » = « antéblanc » (selon Alain Badiou).

 

Mardi 28 janvier 2020. Le noir dialectique.

Pourquoi la couleur noire semble ne pouvoir se dire (pour certains) qu’arrachée des mains prétendues sacrées de la couleur blanche ? C’est étonnant de voir, même chez un philosophe comme Alain Badiou, cet imaginaire qui semble aveugle au noir…

Alors que je continue à réfléchir sur le noir de Soulages, je me cogne contre cet « outrenoir » (théorisé par Alain Badiou) qui m’apparaît comme l’abandon réel du noir : « But maybe it is exactly because I am invisible, light confirms my reality, gives birth to my form. (6) » affirme The Invisible Man, héros d’un roman du même nom de Ralph Ellison. L’équivalence est la même, vérité = lumière et lumière = vérité : « The truth is the light and the light is the truth. (7) » Le héros de Ralph Ellison – comme Alain Badiou – ne conçoit le noir que sous l’emprise d’une dialectique hégélienne selon laquelle le noir-nuit (négatif) n’est qu’un moment censé se résoudre dans le noir-lumière (positif), et le philosophe, avant rongé d’inquiétude, d’angoisse et de peur, rétablit l’Un et l’Ordre. Je sais qu’ici la dialectique n’est qu’un pré-texte, qu’un vêtement, afin de faire entrer par derrière le Même, soit : la lumière. On n’accepte le noir – l’étranger – que dans la mesure où il renvoie littéralement les reflets de la lumière, que dans la mesure où imprégné de lumière, il devient presque blanc. Le noir fait peur – nigerphobie. Passé quelques moments avec lui, nous nous sentons engouffrés dans les opacités infinies de sa surdité, de sa résistance. Alors nous sautons par-dessus – « outrenoir » , allumons la lumière et retrouvons les clartés que sont ordonnancements, partitions et structures. Le noir lui est désordre, chaos et folie. N’est-il pas souhaitable d’abandonner la tentation de la transparence et de voir le noir pour ce qu’il est, soit, un obstacle à la vue, poussant à la vision ? N’est-il pas plus original, d’imaginer le noir-Soulages comme celui qui fuirait les sirènes de police et les contrôles au faciès des gendarmes ? Être invité à méditer (sur) le noir, c’est probablement prendre conscience, petit à petit, qu’elle (la couleur noire) apparaît sous la forme d’une « stance » (position), d’une résistance, voire d’une rébellion contre toute tentative du regard et donc de compréhension. 

 

Première Intuition : nous resterons aveugles à toute vérité (si tant est qu’il en existe) de l’œuvre, de la chose et de l’image.

 

L’expérience vécue du noir me permet d’habiter cette réalité-là, celle où je ne vois pas ; celle où je ne connais pas ; celle où j’accepte d’aller à l’autre dans l’inconnu ; celle où j’accepte d’aller au monde sans angoisse dans une nuit noire dépliant ses ailes de phalène. La vue est barrée, striée, empêchée, refusée et pourtant Alain Badiou veut toujours voir malgré ces impossibilités. Contrairement à lui, je perçois dans le noir un repos et une désobéissance, comme si ce noir qui ne semble rien donner à voir, et qui désobéit à l’idée que nous nous faisons communément d’une couleur, semble m’inviter à son approfondissement et non (uniquement) à une quelconque réflexivité (noir-blanc). Noir signifie ici « patience » et « approfondissement ». 

 

Mercredi 29 janvier 2020. Histoire du noir.

Le livre Noir : Histoire d’une couleur de l’historien Michel Pastoureau est passionnant. Le même jour (j’étais à Angers), je suis allé visiter La Tapisserie de l’Apocalypse au château d’Angers dans les ténèbres de sa galerie. Le noir encadrait les tentures d’une aura sacrée, comme si j’assistais aux confidences d’un sage qui m’annonçait non la fin, mais le renouveau (apocalypse).

En latin, le noir peut se dire « ater » (noir mat) ou « niger » (noir brillant) et que le premier, se rapprochant d’un « mauvais noir, laid, sale, triste voire “atroce” (8) » est resté en latin le plus employé, alors que le second (« d’étymologie obscure (9) » selon Michel Pastoureau) désignerait le beau noir, car brillant. Peut-être pourrions-nous proposer, en réponse à « l’étymologie obscure » du latin « niger », l’hypothèse de l’écrivain et du psychiatre canadien Joël des Rosiers voyant dans l’étymologie du mot « niger » l’influence d’ « une des plus célèbres tribus de cavaliers nomades utilisant les chariots [qui] s’appelait les Nigritai ou Nigritiens. La beauté de leur peau noire est à l’origine du mot latin “niger”. (10) » C’est une hypothèse. Le noir ne serait ensuite nommé qu’une fois sous le mot « niger », donnant « noir » (« neir » en ancien français). Du côté des anciennes langues germaniques, c’est pareil. Nous n’aurions retenu que deux termes : « l’ancien haut-allemand distingue swarz (noir terne) de blach (noir lumineux) (11) » et nous nous rappelons que le noir n’a pas toujours été associé au « Mal », ni au laid ou au négatif (du moins, peut-être et selon Pastoureau, pas avant la Rome impériale et le christianisme médiéval (12) ) et cela est encore plus vrai pour les cultures extra-occidentales : « Dans la Rome impériale, la couleur noire semble donc avoir perdu la dimension bénéfique (fertilité, fécondité, divinité) qui était la sienne au Proche et au Moyen-Orient, en Égypte et même en Grèce archaïque. (13) ». Nous tramons dans toutes ces données la relativité de ce concept de noir qui n’a fait que de se signifier, re-signifier et re-re-signifier. J’observe la relation entre noir-nigernigger-nègre-négro et vois défiler devant moi des brumes d’histoires puant la chair fouettée, lynchée, brûlée et calcinée… Jusqu’à ce que je lise chez Joël des Rosiers : « Le nom des Nigritai lui-même vient d’une racine sémitique, “ngr”, qui signifie “l’eau qui coule dans le sable” […]. (14) » Nègre pourrait vouloir dire cela : « l’eau qui coule dans le sable » – beauté… Le noir a probablement été (en occident) l’une des couleurs, ou la couleur , non seulement la plus mécomprise mais surtout la plus jetée puis récupérée, perdue puis retrouvée. Le noir, en tant que couleur fantasmée, est par-delà le réel, elle nage dans les zones lumineusement tristes du regard du blanc. Je me dis, en ce point de la réflexion : comment émanciper le noir ? Le psychanalyste Frantz Fanon écrit que « Le Noir a deux dimensions. L’une avec son congénère, l’autre avec le Blanc. (15) » Le penseur W.E.B Du Bois avoue : « C’est un sensation bizarre, cette conscience dédoublée, ce sentiment de constamment se regarder par les yeux d’un autre […]. (16) » Il semble exister une ligne de fer liant et reliant blanc-noir-noir-blanc qui paraît résister malgré toutes les tentatives de la casser. Et sur cette ligne, existe une progression axiologique vers le noir ou vers le blanc. Ça monte et ça descend. Cette ligne continue encore aujourd’hui d’être utilisée. Le noir devient un blanc à l’envers ou un noir « en face de », « à côté de », et je veux qu’il devienne non pas le centre (noirisme, noirité…) mais l’existant parmi d’autres existants. Peut-on parler du « nero » (noir en italien) pour lui-même, comme un pur concept ? Disons-le avec Fanon : « le Noir n’existe pas. » Oui mais (et cette fois-ci sans Fanon) il existe en tant que pur concept qui se métamorphose sans cesse, et là réside ses potentialités infinies. Et c’est ce concept (de couleur) que Michel Pastoureau retrace en historien.

 

Jeudi 30 janvier 2020. Le noir de Kerry James Marshall et de Kara Walker.

Je ne me souviens pas de la première fois où je suis tombé sur une image de l’artiste américain Kerry James Marshall… Je me souviens du moment où j’ai enfin compris l’intérêt et l’immense talent de cet artiste qui est maintenant un des plus cotés du marché de l’art international. Son destin est celui d’un artiste qui traque les profonds avec patience.

Quel est ce noir que peint l’artiste américain Kerry James Marshall ? Lorsque je regarde ce noir composé de noir d’ivoire, de carbone et d’oxyde de fer, je ne sais pas si je regarde un motif décoratif, une couleur de peau, un corps ou encore une pure abstraction. Il y a chez lui quelque chose du Carré noir sur fond blanc (1915) de Malevitch et des Ultimate Paintings d’Ad Reinhardt. Mais ce noir, qui était chez eux surface ou négation (le noir en tant qu’absence de profondeur ou de lumière), prend non seulement corps chez Kerry James Marshall mais surtout s’humanise avec des visages, des regards, des volumes. Je retrouve une tautologie chez l’artiste qui ne fait que répéter du noir sur du noir sur encore du noir (avec d’autres couleurs avoisinantes). Il y a surtout des doubles sens, des jeux de langage car son noir est à la fois la couleur noire plastique et picturale (le littéral), le phénotype noir (le signe), une blackness (le symbole) et tout un ensemble de représentations et de projections que nous associons au noir de manière générale. La couleur plastique et le phénotype fusionnent et renvoient, tour à tour, à la couleur noire et aux personnes dites de couleur noire. Nous ne sommes jamais sûrs de ce que les noirs de Kerry James Marshall signifient, et c’est précisément cela qui les rend si troublants. Nous sommes plongés au cœur de leur nuit.

Dans un tableau de la série des Untitled (Painter), peint en 2008 par Kerry James Marshall, je rencontre une figure d’un noir profond, dense et légèrement reflétant la lumière (c’est un homme), coiffé d’une afro, elle aussi noire mais d’un noir-gris, tenant dans sa main droite une palette composée de plusieurs gammes et nuances de couleurs et « trempant » son pinceau dans du noir de la même couleur que la peau de la figure (à côté d’une tache de peinture blanche – nous retrouvons ici la bifidité du noir). Et derrière lui, un fond noir, plus mat et éclairé. Il est question ici, comme dans les autoportraits classiques de cette même réflexivité entre le peintre peignant et le peintre représenté. Le peintre se représente en train de peindre. Mais ici nous ne savons réellement pas si le peintre représenté dans le tableau se représente lui-même en se peignant avec ce noir qui est de la même couleur que lui ou s’il peint un autre tableau hors-champ. Invisibilité du noir.

Le noir se fond, se confond comme un motif décoratif – le noir est une peau, une surface –, la peau est ici un masque, c’est littéralement une blackface mais comment, oui comment se représenter alors que le Noir a tout le temps été affublé d’un masque qui a toujours été le signe d’une mise à résidence, d’une ghettoïsation ? Comment trouver au bout son visage ou comment sculpter dans la nuit son visage, comment produire du volume à partir de cette surface qu’a été le noir pendant si longtemps ? Voici une idée intéressante, sculpter dans la nuit son propre visage en volume pour trouver, enfin, un visage qui ne soit ni guidé, ni cerné – ni mis à plat – par le regard. 

 

Seconde intuition : la couleur noire et le Noir ne font qu’un, c’est la même, et nous ne pourrons émanciper l’un sans émanciper l’autre.

 

Nous pourrions faire un détour et parler aussi des noirs de l’artiste plasticienne Kara Walker. L’artiste nous rappelle, avec ses silhouettes, que le noir a été construit et pensé (par le pouvoir colonial) exclusivement comme surface absolument vide, sans profondeur, sans organes, sans humanité, sans « unité ». Le noir signifie métaphoriquement l’absence, le silence, mais les ombres noires de l’artiste parlent ; elles racontent des histoires de meurtres, de coupures, de mutilations, de violences, de féminicides ; elles donnent à voir des spectres, des fantômes qui ne sont pas partis et qui continuent de hanter ; elles déplient une fresque, un spectacle de silhouettes noires qui nous rappellent les ministrel shows où le·la Noir·e n’était qu’une clownerie, qu’un gouffre aux rires, aux plaisanteries et aux humiliations. La couleur, comme le langage, possède ses stéréotypes et l’artiste retrace tous ces fantasmes qui se sont posés sur le corps noir, ces fantasmes qui l’ont réduit à une génitalité (le corps noir, masculin comme féminin, réduit métonymiquement qu’à son sexe), à un exotisme, à ce que d’aucuns appellent un « primitivisme ». 

 

Troisième  intuition : l’histoire de la couleur noire est une histoire de la barbarie…

 

Chez ces deux artistes plasticiens, il n’y a que des noirs particuliers ; des noirs plus ou moins noirs, des femmes-noires, des hommes-noirs, des noirs opaques, des noirs clairs. Et ces femmes-noires sont la cible répétée des regards qui ne sont que prédations, la couleur noire chez les femmes-noires ne peut pas signifier qu’une abstraction, elle doit en même temps signifier l’histoire de ces prédations et de ces violences sur les corps. Parler du noir, c’est aussi parler de cela. Ces femmes-noires ont été construites comme doublement noires : à la fois désignées « sorcières », et donc systématiquement associées à l’univers négatif du noir (comme dans Moi, Tituba sorcière…Noire de Salem de Maryse Condé), et à la fois désignées « noires ». Elles ont été les plus marginalisées et les plus dangereuses pour ces mêmes regards coloniaux d’hommes qui les chosifiaient. Elles sont un « outrenoir » qui n’est pas celui de Soulages, elles sont une révolte qui crie, loin. 

Le noir m’est indisponible, cela veut dire que je ne peux pas disposer de lui à part en le ramenant à la (ma) lumière qui ne fera que refléter non pas le noir, mais ce qui se trouve en face de lui. Noir veut dire ici « indisponibilité ».

 

Vendredi 31 janvier 2020. Poésie noire.

Je me demande s’il est possible de parler de l’émancipation du noir (la couleur) comme de celle d’une collectivité… Je me demande si l’épanouissement de toute couleur n’est pas à chaque fois et en même temps celle d’une personne, d’un groupe, d’un territoire. L’idée n’est pas simplement de réfléchir à une politique des couleurs, mais à une manière de mêler esthétique, théorie, philosophie, de tout mêler et emmêler pour créer du noir. 

Ce noir qui est aussi le mien, qui est aussi celui des plats et des cour/bures de mon corps-

sculpture qui n’est plus à l’heure des désaliénations douloureuses,

qui est seulement.

Cette sculpture qui est lue comme une projection, un spectre aujourd’hui bienveillant.

D’autres fois, je la sais être, hélas, le support répété des fantasmes et des re/gards qui sont des menottes de flics. Mais ce corps est une nuit qui

débat ses hèles vrombissantes,

qui plonge dans les anneaux bleus de tes yeux.

Le noir de Kerry James Marshall n’est pas neutre, il est, en étant une révolution plastique, une révolution politique en déjouant l’axiologie des couleurs, en cassant la ligne de fer Noir-Blanc. Et ce noir ramène une foule avec lui, cette foule composée de tout le spectre, composée des noirs de Mickalene Thomas, de l’artiste Kara Walker, de Franz Kline, des noirs sombres de Rembrandt, des noirs de Jean- Michel Basquiat, des noirs de Théodore Géricault, marchant dans les boulevards de l’art avec pancartes et attendant la femme, l’homme, qui dira, juché sur sa plateforme, non plus seulement que le noir est beau mais que le noir est magnifiquement inépuisable. Et ça ne sera plus une étude historique abstraite du noir qui sera faite, mais une remontée des noirs et des Noir·e·s de l’histoire de l’art. Une remontée dans les nuits d’une histoire de l’art ou des histoires de l’art, qui alternera entre histoires de navires incendiés, corps ébène, subtilités des noirs de Rembrandt et énergie des griffes noires de Kline. J’imagine ces nouveaux cours d’histoire de l’art (je me proposerais moi de faire l’histoire de ce genre que j’appellerais la « Figuration noire (17) ») où esthétique et politique s’enlacent sans surprise. J’imagine ces nouveaux glissements de l’art à la vie,

où chaque émancipation du noir

signifiera l’émancipation du Noir.

 

© All stylistics rights are reserved to Chris Cyrille 

 

 

Peinture 165 x 117 cm, 1er février 2000 | pierre-soulages.com
Pierre Soulages, Peinture 165 x 117 cm, 1er février 2000, huile et acrylique sur toile, Suisse, collection particulière.

 

 

 

Kerry James Marshall, Untitled (Painter), 2008, acrylic sur panneau en PVC, 184,8 x 155,6 x 10,2 cm, Harvard Art Museums/Fogg Museum

 

Kara Walker. Gone: An Historical Romance of a Civil War as It ...
Kara Walker, Gone: An Historical Romance of a Civil War as It Occurred b’tween the Dusky Thighs of One Young Negress and Her Heart, 1994, papier découpé, collage sur mur à la cire, 3,962 x 15,24 m, Museum of Modern Art (MoMA), New York, États-Unis, courtesy of Sikkema Jenkins & Co, New York.

 

Chris cyrille
Image à la une : Elladj Lincy Deloumeaux, Le Cri , peinture à l’huile sur papier, 57,2 x 40,5 cm

1. Ce texte a été écrit à la suite de l’exposition Soulages au Louvre au Musée de Louvre (11 décembre 2019 - 9 mars 2020).
2. Alain Badiou, Pierre Soulages : Un peintre affirmationniste ?, Centre Pompidou, Paris, 2019, p. 7.
3.Ibidem, p. 14.
4. Ibid., p. 16.
5. Ibid., p. 16.
6. Ralph Ellison, The Invisible Man, Londres, Penguin Group, 2014 (1952), p. 6 : « Mais peut-être que parce que je suis invisible, la lumière confirme ma réalité, donne naissance à ma forme. »
7. Ibidem, p. 7 : « La vérité est la lumière et la lumière est la vérité. »
8. Michel Pastoureau, Noir : Histoire d’une couleur, Paris, Points, 2008, p. 35.
9. Michel Pastoureau, op. cit., p. 36.
10. Joël des Rosiers, Théories des caraïbes : Poétique du déracinement, Montréal, Triptyque, 2009, p. 185.
11. Michel Pastoureau, op. cit., p.37.
12. Ibidem, p. 57 : « L’époque féodale est en Occident la grande époque du “mauvais noir”. »
13. Ibid., p. 43.
14. Joël des Rosiers, op. cit., p. 185.
15. Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Paris, Points, 1952, p. 13.
16. W.E.B Du Bois, Les âmes du peuple noir, Paris, La Découverte, 2007 (1903), p. 11.
17. La « Figuration noire » (si cette appellation devait désigner un genre) ne renverrait pas aux émergences ponctuelles des figures noires dans l’art occidental mais plutôt aux pratiques de peintres et artistes qui se sont, un moment donné, saisis de la question de la représentation et de la représentabilité du Noir. Autre possible définition : la « Figuration noire » retrace les pratiques plastiques subversives de certains artistes (non nécessairement noirs) qui ont transformé la surface noire minorée en un volume et une profondeur. Je renvoie le lecteur à un article que j’avais déjà écrit : « Figuration noire : Basquiat, Kerry James Marshall & Kehinde Wiley par Chris Cyrille », Point Contemporain, 2018 [en ligne] http://pointcontemporain-pratiquescritiques.com/figuration-noire-basquiat-kerry-james-marshall-kehinde-wiley-par-chris-cyrille/ [consulté le 3 avril 2020].

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